Le 10 avril dernier, au soir du premier tour, le résultat du podium était plus serré qu’annoncé : Emmanuel Macron à 27,85 %, Marine Le Pen à 23,15 % et Jean-Luc Mélenchon à 21,95 %. Loin devant les autres candidats et laissant les partis historiques exsangues financièrement sous la barre des 5 % (Républicains, EELV, PCF et PS). L’ordre d’arrivée était prévisible puisqu’il n’y avait pas eu de candidature d’union à gauche.

Le 24 avril, au regard des résultats du second tour, le cœur était lui aussi plus serré qu’espéré : si 5 millions de bulletins de vote ont séparé Emmanuel Macron (18,8 millions) de Marine Le Pen (13,3) – au milieu d’un record de près de 16,7 millions de voix non exprimés (abstention, blancs ou nuls) – on pouvait surtout noter que la candidate du Rassemblement national avait conquit 7,5 points de plus que cinq ans plus tôt. Arrivée en tête dans plus de 20 000 communes dès le premier tour, elle n’a été largement devancée au second que dans les centres métropolitains et sur la façade atlantique. Pour les amoureux des cartes électorales, je recommande cette synthèse des résultats clés réalisée par les équipes de franceinfo.

Paradoxalement, les forces politiques de gauche sont aujourd’hui favorables à l’alliance qui était inenvisageable hier. Le gâchis d’avril pourrait se transformer en rattrapage de juin si la nouvelle union populaire écologique et sociale venait à l’emporter aux élections législatives. Hélas, le fonctionnement césariste de la Ve République laisse peu d’espace pour une revanche parlementariste au « troisième tour ». Le plus probable est de voir se multiplier les triangulaires et d’aboutir à une majorité présidentielle faible – et d’ores et déjà divisée dans la perspective de la succession. L’alternative d’une tripartition insoluble, en miroir des trois blocs qui ressemblent à ceux du repli, du déni et du répit face à l’urgence climatique et sociale, aura du mal à faire exister des institutions conçues pour un bipartisme fortement déséquilibré par le fait majoritaire.

Il n’est pas exclu que de l’incertitude jaillissent de bonnes surprises. À ce titre, je m’intéresse surtout aux nouvelles candidatures citoyennes qui, je l’espère, seront soutenues malgré l’appétit des formations politiques installées. Je pense notamment aux six candidatures accompagnées par la nouvelle structure Quartier Général pour que le renouvellement ne soit pas qu’un ripolinage de façade. J’attends de voir qui parmi les « élèves » de l’Académie des Futurs Leaders, du Collège citoyen de France et du collectif Investies franchira le pas. J’admire aussi la méthodique campagne de terrain menée par Quitterie de Villepin à Paris, qui s’articule autour du projet d’introduire un mandat délibératif et de suivre la boussole fixée par l’Accord de Paris sur le Climat et les 17 objectifs de développement durable des Nations Unies. Nous avons besoin de ces nouvelles méthodes et de ces nouveaux visages.