Selon l’adage, il convient de se méfier de l’arithmétique des sondages à un an d’une élection présidentielle. Néanmoins, celle qui approche présente beaucoup moins d’incertitude que les précédentes. L’avance de Marine Le Pen et Emmanuel Macron est telle qu’il semble plus hasardeux de pronostiquer le résultat du second tour que du premier. Ce non-choix est mortifère. Cette élection est la dernière qui permettra de réorienter nos politiques publiques avant le point de non retour en matière de réchauffement climatique à l’horizon 2030 et le débat public est prisonnier des opinions et figures conservatrices et xénophobes. Dans ce contexte, les deux favoris incarnent à mes yeux les idéologies du repli et du déni – avec une efficacité redoutable puisque leurs socles se sont consolidés depuis leur premier affrontement en 2017. On peut le regretter, mais l’équation de 2022 est simple : en s’unissant, celles et ceux qui aspirent à une alternative écologique, démocratique et sociale à ce duo ne sont déjà pas sûrs d’arriver à rivaliser ; alors séparés, quel espoir reste-t-il ?
Dans les têtes, la défaite paraît déjà internalisée. Alors que les constats sont partagés sur l’urgence climatique et la lutte contre les injustices, chaque micro-polémique est un bon piège pour marquer des différences dérisoires. Puisque les états-majors préfèrent se dérober face à leur responsabilité historique, il ne reste que la pression populaire pour éviter l’éparpillement. Elles sont encore trop peu visibles au-delà des cercles initiés, mais des initiatives citoyennes émergent. Ces dernières semaines, les Investies ont révélé leur existence et préparent des candidates aux élections législatives sur tout le territoire. J’avais évoqué en début d’année le travail programmatique de la Rencontre des Justices. L’étape suivante, c’est l’organisation d’une primaire populaire d’un genre nouveau. Reprenant certains ingrédients de laprimaire.org – notamment le vote au jugement majoritaire – cette nouvelle itération ajoute un corpus de propositions préparé, entre autres, avec les partis politiques qui n’ont donc pas de raison de s’en désolidariser. C’est maintenant à notre tour de faire monter la pression.