Ce n’est pas un drame, mais pour la première fois en huit années, Open Source Politics va clôturer un exercice déficitaire au 31 décembre 2024. Il n’aura échappé à personne que la conjoncture est peu porteuse depuis de longs mois et que les finances publiques se raréfient brutalement ces derniers temps. Chacun constate à tous les niveaux la difficulté d’équilibrer un budget. Par le passé, cette situation m’aurait paniqué ; aujourd’hui, après le passage par la formation que j’ai suivie l’an dernier, j’en sors motivé – quoiqu’un peu bousculé. Surtout, je pense que ce cheminement mérite de continuer à être partagé, voire discuté. Même si elle peut inquiéter, je reste convaincu que la transparence d’OSP a de nombreuses vertus.

D’autres acteurs préfèrent rester plus discrets sur leur niveau de rentabilité, mais une simple analyse de la baisse des effectifs de chaque structure montre que le secteur de la démocratie numérique en France s’est sensiblement contracté depuis au moins deux ans. D’abord parce que les principales institutions – au premier rang desquelles l’État lui-même – se sont déjà dotées d’outils les années précédentes, ont internalisé des compétences et parfois tout simplement réduit le volume de leurs démarches citoyennes en ces temps d’incertitudes électorales et de contraintes budgétaires. Ensuite parce que l’appétit pour une démocratie plus ouverte au quotidien ne concerne peut-être, a priori, qu’une minorité de la population et des décideurs. Notre marché a connu des années fastes et nous avons emmagasiné des réserves ; à nous de nous réinventer pour montrer notre utilité quand le temps se gâte.

On peut légitimement se demander quel changement opérer dans pareil contexte. Jeter l’éponge à la première difficulté pour mieux nous recycler ? Nous sommes plus résilients que cela. Participer aux mouvements de consolidation qui se préparent à bas bruit sur ce marché ? Ce serait diluer nos engagements pour le logiciel libre et renoncer à notre identité indépendante. Nous recroqueviller sur nos acquis et entrer dans une guerre des prix ? Nous avons au contraire choisi d’investir dans notre équipe et nos outils – d’où le déséquilibre en fin d’année – pour mieux nous diversifier.

Cette année, nous avons attiré des talents plus expérimentés, par exemple pour refondre notre stratégie data. Nous avons consolidé des partenariats, par exemple pour déployer le nouvel outil Grist, ce tableur augmenté qui permet de gérer toutes sortes de projets et bases de données. Nous avons continué à raisonner à l’échelle européenne, par exemple en remportant notre premier appel d’offres en Allemagne avec Decidim. Nous avons intégré de nouvelles communautés, par exemple en contribuant à ce que le projet Rudi devienne un commun numérique de référence pour le partage de données locales. Nous avons valorisé nos expertises, par exemple en organisant une série de conférences au printemps, en doublant le lectorat de notre lettre d’information ou en actualisant un guide complet sur la conduite de budgets participatifs. Toutes ces pistes ne se sont pas concrétisées en succès économique aussi vite que prévu dans notre plan de croissance, mais nos orientations commencent toutes à porter leurs fruits. L’hiver est là, et nous anticipons qu’il pourrait durer. C’est un pari qui présente des défis, mais nous sommes prêts.