Pour notre week-end anniversaire avec Hélène, nous avons mis le cap sur Jersey. Sise à deux dizaines de kilomètres de nos côtes, la plus grande des îles anglo-normandes est une belle découverte. En attendant un éventuel nouveau tunnel sous la Manche, Saint-Hélier se relie en une heure et demie de traversée au départ de Saint-Malo. On y lit un vieux français maladroit à chaque nom de rue ou d’habitation, mais tout le reste sur l’île et chez ses quelques cent mille habitants sonne britannique. Après tout, le bailliage de Jersey – qui n’a jamais fait partie de l’Union européenne – est un paradis fiscal rattaché à l’Angleterre depuis le milieu du XIIIe siècle. 

Les Jersiais roulent à gauche et il est préférable de se doter d’un vélo pour arpenter les côtes. Nous nous passons de l’assistance électrique en raison des prix pratiqués par les loueurs. Le fond de l’air est frais en ce début de printemps, mais nous sommes épargnés par la pluie – nous sommes passés à quelques heures d’une tempête qui aurait bien pu nous retenir sur l’île. Le premier jour, une agréable piste cyclable nous conduit de la plage méridionale de Saint-Aubin jusqu’au joli phare de la pointe de la Corbière. Nous remontons ensuite à marée basse l’immense plage de Saint-Ouen, repaire des surfers, puis grimpons jusqu’à la baie de Plémont, cette fois-ci recouverte à marée haute. Au retour, nous serpentons entre les champs de pommes de terre du nord agricole avant de retrouver, fourbus, le sud urbanisé.

Après le tour à l’ouest, nous prenons le lendemain la direction de l’est. Nous passons de la plage à la campagne et inversement, déboussolés par l’impression de connaître ces paysages tout en pédalant dans un autre univers. Au loin se détache la silhouette de l’indomptable château Mont Orgueil. L’imposant édifice mérite une visite complète. Du sommet de ses remparts, assiégés par les vents, nous pouvons distinguer la Normandie – bien française cette fois-ci ! Nous n’aurons pas le temps de boucler le tour de l’île par le nord-est ou de goûter à plus de saveurs british, mais nous repartons reconnaissants d’avoir pu profiter de ce weekend au grand air et désireux de faire prochainement escale à Guernesey, où Victor Hugo s’était exilé.