Je n’ai jamais adhéré à l’idée que le succès populaire des mondes imaginaires témoignait du désir d’échapper à une réalité trop âpre. Au contraire, les meilleurs univers de fiction à mes yeux sont ceux qui servent de scène à des engagements politiques qui nous évitent de baisser les bras. Ceci dit, après la terrible année 2024 et son flot de guerres, de catastrophes climatiques et de reculs démocratiques presque partout dans le monde, nos cerveaux ont bien besoin d’une dose d’émerveillement.
Comme je le constatais déjà l’an passé, les plaisirs familiaux et défis professionnels ont beaucoup rogné sur le temps d’évasion par la lecture, le visionnage ou l’expérience ludique en 2024. Restons patients et prudents pour 2025 ; les nuits devraient être hachées et les journées bien occupées pour quelques temps encore… Toutefois, parmi les rares films ou séries regardées ces derniers mois, nous avons débuté l’année par le rattrapage de la première saison d’Arcane et fini en décembre par le final de la seconde.
Arcane est une série d’animation dérivée de League of Legends, le phénomène des compétitions internationales d’e-sport… que je connais très mal. Le lore de cet univers de Runeterra m’échappe, et avec lui certaines clés scénaristiques de la série. L’intrigue pour l’essentiel se concentre sur deux héroïnes du jeu vidéo, Vi et Jinx. Les sœurs orphelines empruntent des trajectoires divergentes pour apaiser leurs peines et trouver un brin de justice dans les cités jumelles et opposées de Zaun la malfamée et Piltover la privilégiée.
Au-delà de l’intrigue et ses protagonistes en quête de pouvoir ou de savoir, d’équilibre ou de vengeance dans ce monde où science et magie s’imbriquent dans de puissants et dangereux artefacts technologiques, c’est l’excellence et la variété de l’animation qui nous transporte. L’esthétique steam-punk ici déployée déborde de nuances. Chaque épisode contient des scènes exploitant une pluralité de styles graphiques, allant de nostalgiques aquarelles aux prouesses frénétiques en 3D en passant par des palettes bichromatiques et des explosions de couleurs. Il a fallu plus de huit années de développement au studio français Fortiche Production – cocorico ! – pour concevoir les dix-huit épisodes qui ont été acclamés par les critiques et ont battu des records de vues sur Netflix à travers le monde. Un véritable travail d’orfèvres.