Dans ce contexte politique si éloigné de la fête, Paris s’apprête à accueillir les Jeux olympiques et paralympiques. Si mon excitation pour l’événement s’est atténuée, c’est aussi parce que j’ai déjà eu cette chance, il y a seize ans, de vivre une semaine au cœur des Jeux. C’était à Pékin, en 2008.
Après une année passée dans la capitale chinoise en échange universitaire, j’ai été recruté avec quelques condisciples comme interprète bénévole par le Club France. Emanation du CNOSF, le Club France est le point de ralliement de toute la délégation tricolore qui accompagne les athlètes et ne réside pas au village olympique. Politiques, dirigeants des fédérations, journalistes, familles des sportifs, tout le monde s’y retrouve pour fêter les médailles. Dans le cas de Pékin, il était nécessaire d’aider ces invités à rejoindre les sites de compétition ou visiter les principaux monuments.
J’ai gardé autant de souvenirs en dehors des stades que dedans. L’attente fébrile de la prolongation de nos visas, obtenu à la veille de leur expiration par intervention de l’ambassade de France auprès du comité d’organisation. L’attente encore, cette fois pour accueillir le cortège de Nicolas Sarkozy dans le hall du Sofitel, effaré par les efforts du personnel pour synchroniser les ascenseurs afin qu’il n’attende pas une seule seconde à son arrivée. La visite des responsables des fédérations dans les annexes de la Cité interdite car le président russe Dmitri Meydvedev s’était réservé une visite familiale dans l’artère principale. Tant de privilèges qui se manifestent autour de la fête populaire, restée inaccessible à la majorité des Chinois.
Notre position de bénévoles nous octroyait à nous aussi un grand privilège : des billets pour accompagner les invités. Ainsi ai-je eu la chance de voir des épreuves d’escrime, de handball, de judo, de beach volley, et surtout de natation et d’athlétisme dans les magnifiques Cube d’eau et Nid d’oiseau, les deux signatures architecturales de cette olympiade. Le soir, en rentrant des compétitions, nous croisions Alain Bernard, Laure Manaudou, Gaël Monfils ou le débutant Teddy Riner entouré de sa famille. Les nuits étaient courtes, mais nous vivions dans l’insouciance d’un rêve olympique éveillé.