Voir le monde avec des yeux d’enfant est un antidote efficace aux tracas du monde. Ce mois-ci, j’ai pu réaliser deux projets qui me tenaient à cœur : passer le diplôme d’éducateur pour animer en autonomie les séances de baby-rugby du Racing Club de Brocéliande et organiser des ateliers d’éveil à la citoyenneté dans l’école d’Ulysse et Sirius.
Depuis des années, lorsque l’on me demande ce que j’aimerais faire pour que la démocratie se porte mieux, je réponds qu’il faudrait la faire pratiquer dès l’école. En devenant parent d’élèves, un terrain d’expérimentation est devenu accessible. Aussi, après avoir procrastiné toute l’année de petite section, ais-je suivi ma bonne résolution en proposant dès septembre dernier aux enseignantes de l’école primaire Marthe Niel de Paimpont de mettre en place des ateliers adaptés à leurs classes respectives.
L’intention partagée, j’ai compris de nos premières discussions que la principale difficulté allait être de placer l’ambition au bon niveau pour chaque âge. Les capacités de concentration, de compréhension puis d’argumentation évoluent très sensiblement d’une classe à l’autre. En décembre, un premier temps d’observation m’a permis de passer dans chaque classe de double niveau, de la maternelle au CM1-CM2. J’ai échafaudé mon programme sur la base de ces interactions. Chez les plus jeunes, il faut avant tout susciter l’écoute et l’expression grâce à un récit captivant ; chez les plus grands, il faut faciliter l’échange entre les extravertis et les « petits-parleurs », mais toutes et tous savent mettre des mots sur leurs idées.
Mi-mai, j’ai pu animer les premiers ateliers que j’ai conçus pour la centaine d’élèves de l’école. En petite et moyenne section, il fallait aider Monsieur Hibou, la mascotte de la classe, à s’échapper de la maison de tous les dangers grâce à un découpage/assemblage collaboratif de pièces de puzzle puis à l’identification des objets dangereux de la vie quotidienne. En grande section/CP, une petite histoire se terminait sur un arbitrage moral entre dire la vérité ou cacher une bêtise faite ensemble. En CE1, une discussion en binômes puis en groupe complet sur la liberté de parole des enfants lors des repas de famille permettait d’illustrer l’évolution des régimes politiques de la royauté à nos jours. En CE2, un sondage sur les temps de l’enfant et des débats mouvants dans la classe aboutissaient à prioriser les activités scolaires les plus appréciées. En CM1-CM2, un jeu de rôles rassemblant représentants de la mairie, des riverains, des enfants, des parents et des enseignants simulait une délibération au sujet de l’installation d’une nouvelle aire de jeux dans la commune.
Certains formats ont très bien fonctionné, d’autres plaçaient la barre légèrement trop haut. L’hypothèse initiale est confirmée : par le jeu, les histoires et les mises en situation, il est possible d’intéresser et d’impliquer tout le monde, dès 3 ans, autour des apprentissages civiques. Rendez-vous est pris pour l’an prochain, avec de nouveaux ateliers complémentaires pour laisser s’exprimer la voix des enfants. Je formaliserai ensuite un kit pour favoriser la réplication, dans la lignée de ce que font de formidables associations comme Parlons démocratie (surtout pour les collégiens et lycéens) ou la Fabrique des communs pédagogiques. Si cela vous intrigue ou vous inspire, parlons-en !